Véhicule électrique : ne pas rater l'occasion | Communiqué de presse

Le transport est devenu le premier point faible de la France dans la course à la décarbonation : il représente aujourd’hui un tiers des émissions nationales de gaz à effet de serre, un niveau qui n’a quasiment pas reculé depuis trente ans. Dans cette nouvelle Note du Conseil d’analyse économique, Sylvain Chassang montre que si une électrification accélérée du parc est indispensable, elle ne suffira pas si on ignore la dynamique du marché de l’occasion et les usages réels des véhicules. Réduire immédiatement de 10 % le kilométrage parcouru aurait, d’ici 2035, un effet climatique comparable à la vente de véhicules neufs quasi intégralement électriques. En combinant visibilité réglementaire, incitations à l’épargne et à la sobriété, information renforcée au moment de l’achat et mesure fine des usages, la France peut réduire rapidement les émissions du parc automobile tout en limitant le coût budgétaire des aides.

Ajustements aux dispositifs existants

L’incertitude du futur du marché automobile inquiète tant les constructeurs que les automobilistes. Face à cela et compte tenu des objectifs européens, la stabilité réglementaire est la première condition pour orienter les choix industriels et ménagers.

Recommandation 1. Garantir un cadre réglementaire stable confirmant la transition vers le véhicule électrique et donner trois ans de visibilité sur l’évolution du malus afin de sécuriser la planification des constructeurs.

Le rôle central du marché de l’occasion

Trois voitures sur quatre achetées par les ménages sont d’occasion ; la durée de vie moyenne atteint désormais onze ans. Des aides concentrées sur l’achat neuf déséquilibrent ce marché et renchérissent les véhicules d’occasion électriques.

Recommandation 2. Remplacer les primes d’achat par une subvention étalée sur la durée de détention, proportionnelle au coût annuel, pour stabiliser les prix du parc d’occasion et rendre le véhicule électrique attractif sur le long terme.

 Influencer le choix au moment du renouvellement, plutôt que la rapidité du renouvellement

En raison du dynamisme du marché de l’occasion, accélérer le remplacement de voitures thermiques d’occasion présente peu d’intérêt. Par exemple, un ménage qui roule peu reste le meilleur propriétaire d’un véhicule thermique ancien ; le pousser à la revente transfère jusqu’à 60 % des émissions restantes (sur la durée de vie du véhicule) à un conducteur plus intensif.  Il est ainsi plus efficace d’influencer le choix de véhicule une fois que la décision de renouvellement a été prise.

Recommandation 3. Créer un plan d’épargne verte permettant aux ménages qui s’engagent à acheter un véhicule électrique d’épargner à un rendement subventionné. Investir les fonds collectés dans un fonds d’infrastructure électrique.

Avec un million de foyers épargnant 6 000 €, une bonification du livret A de 3 % coûterait dix fois moins cher qu’une subvention classique, et permettrait de créer un fonds d’investissement d’environ 12 milliards d’euros.

Recommandation 4. Systématiser le diagnostic d’usage et l’essai d’un modèle électrique chez le concessionnaire, tout en incitant financièrement la vente de ces véhicules.

Recommandation 5. Exiger des opérateurs de grandes flottes d’entreprise l’inclusion systématique de modèles électriques dans les choix offerts aux salariés.

 Mesurer et valoriser les usages

Mieux intégrer l’usage dans les politiques publiques permettrait de réduire rapidement et à coût réduit les émissions du parc. Agir sur l’usage ne se limite pas à réduire les kilomètres parcourus, il faut aussi encourager une conduite plus économe en énergie. À cet égard, il apparait opportun de promouvoir l’assurance au kilomètre, d’instaurer un suivi des flottes d’entreprise pour mieux les accompagner dans l’adoption de véhicules adaptés à leur besoin, de mieux prendre en compte les faibles usages dans les politiques publiques et d’œuvrer à la construction d’un modèle économique promouvant la réduction d’usage.

Recommandation 6. Faire de l’assurance au kilomètre l’option par défaut des contrats d’assurance automobile.

Recommandation 7. Instaurer une obligation de suivi et de transmission des données d’usage pour les grandes flottes d’entreprise afin de mieux cibler les politiques d’électrification en fonction des pratiques réelles et d’adapter la réglementation aux contraintes spécifiques des usagers.

Recommandation 8. Éviter de pénaliser les petits rouleurs dans les politiques publiques de renouvellement du parc automobile. Améliorer la communication sur l’usage optimal d’un véhicule thermique en fin de vie.

Recommandation 9. Transférer la propriété des données de la télémétrie aux usagers sur la base de l’open banking. Autoriser les constructeurs à déduire une part de leurs pénalités CO2 en proportion des kilomètres évités afin de faire de la sobriété un levier rentable pour tous les acteurs.

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